https://www.patrimoinedefrance.fr/paris/29-la-vie-de-nos-monuments/485-l-arbre-blanc.html#sigProIde540311977
Au XXIe siècle, Montpellier renoue avec ses folies du XVIIIe
Incontestablement, « L’Arbre Blanc » de Montpellier est une œuvre d’art. Remarquable folie architecturale de 17 étages, dessinée par Sou Fujimoto, Nicolas Lainé, Manal Rachdi et Dimitri Roussel. Située entre l’hôtel de Région de Ricardo Bofill et la bibliothèque universitaire Richter de René Dottelonde. Pour sa première intervention en Europe, l’architecte japonais signe un bâtiment unique ouvrant ses 112 appartements sur 194 terrasses et 170 ombrières blanches, comme suspendues dans le vide. Effet visuel superbe, à toute heure du jour et de la nuit.
A l’issue de trois ans de chantier, après un concours gagné en 2013, on mesure l’audace des promoteurs (Promeo, Evolis Promotion, Crédit Agricole Languedoc Immobilier Promotion et Opalia), des architectes et des équipes techniques. Et leurs savoir-faire. « Ils l’ont fait ! » pouvait-on entendre le 19 juin 2019, jour de l’inauguration.
Pour une telle œuvre, il est intéressant, parfois amusant, de refaire l’histoire. En remontant au premier appel téléphonique au Japon de Nicolas Laisné. « Surprise, Marie de France a été mon interlocutrice » confie-t-il, encore étonné aujourd’hui. A Tokyo, la jeune femme, titulaire d’un master d’architecture, travaillait déjà chez Sou Fujimoto Architects. Pour elle aussi, l’Arbre Blanc est une belle aventure. Pressentie d’emblée par Sou Fujimoto. « Quand j’ai reçu l’appel de ces trois garçons enthousiastes (Nicolas, Manal et Dimitri ndlr), ça m’a emballé ». Il faut dire que le défi avait de quoi séduire.
Pour répondre aux demandes de la ville, Il s’agissait de construire une folie, tour signal de Montpellier, pour « enrichir le déjà très beau patrimoine architectural de cette métropole audacieuse et innovante » rappelle Philippe Saurel, maire et président de Montpellier 3M. C’est donc sur ces bases, et dans l’idée de rapprocher les cultures, que les trois architectes sont allés dans la capitale de l’empire du soleil levant. « Le quatuor, puis une équipe de huit, ont conçu la tour en une dizaine de jours, travaillant sur le principe d’un workshop » aime rappeler Nicolas. Avec la volonté de donner un nouveau souffle à la tour du XXIe siècle, en imaginant des balcons comme des jardins suspendus.
Trois ans de mise au point pour obtenir le permis de construire et, heureusement, des clients qui adhèrent à la proposition architecturale. Restaient à résoudre des problèmes techniques et revoir, dans certains cas, les processus. « Pour assembler sur place les balcons fabriqués en usine, de 3,5 tonnes en moyenne, on a créé une barge sur laquelle on les posait. Avec la difficulté d’arrimer des porte-à-faux allant jusqu’à 7,5m. Du grand mécano ! » rappelle Nicolas en rendant hommage à André Verdier, un ingénieur de la région qui a joué un rôle clef dans l’opération. Avant de confier « On a construit un petit Arbre Blanc à côté de la gare. Avec ce prototype, on a tout mis au point » et d’avouer « On devait commencer à installer les balcons à partir du bas. On a fait le contraire ».
Quant aux ombrières, les plus grandes d’Europe, elles participent également au rafraîchissement du bâtiment. Remarquables aussi certains appartements disposant de plusieurs terrasses à des niveaux différents. Personnes sujettes au vertige, évitez les escaliers passant, dans le vide, de l’une à l’autre ! Et comme Dieu est dans les détails, les concepteurs ont prévu des caves pour éviter les stockages disgracieux à l’extérieur. Ultime luxe, le local poubelles est climatisé.
Et pour mieux mesurer la spécificité de l’opération, quelques données : un investissement total de 42 millions d’euros ayant fait travailler 25 entreprises, 15 bureaux d’études et 1500 personnes. Pour une surface construite de 21 300 m² et de 8 200 m² de surface habitable, du T2 au T5.
3 500m² de balcons et 500 tonnes d’acier. Rien d’étonnant que ce projet, hors normes, ait obtenu une pyramide d’argent en 2017.
Au-delà d’un bâtiment d’habitation exceptionnel, l’Arbre Blanc ne peut laisser indifférents les montpelliérains et les touristes, car il leur est accessible. D’abord par son bar panoramique au sommet, protégé des vents !
Vue à 380° assurée, sur la ville, la mer et le Pic Saint Loup. Mais aussi par un restaurant bistronomique pouvant accueillir 60 convives en bas de l’Arbre et le même nombre sur une terrasse plongeant sur le Lez. « L’Arbre, bar en haut, restaurant en bas » est géré par des références de la cuisine locale, Charles Fontès et Eric Cellier.
Autre structure valorisante, une galerie, « La Serre », de 245m² au rez-de-chaussée, dédiée à l’Art contemporain. Avec un espace de travail partagé pour les artistes. Venant compléter un autre lieu de 2 000 m², « Le Réservoir », au cœur de Sète, ayant la même vocation.
Afin de proposer, dans le cadre d’« Art et Patrimoine » créé par Gilbert Ganivenq, un concept innovant s’adressant aux particuliers comme aux entreprises.
Un nouveau lieu iconique de cinquante mètres de haut, aux vies multiples, vient de naître dans le ciel de la métropole languedocienne.
Guy Hébert